Le droit de douter
Vous avez probablement déjà entendu parler de la crise de la trentaine et de la quarantaine. Fait intéressant, depuis quelques années, la psychologie et la sociologie s’intéressent davantage aux jeunes adultes (les 20-35 ans), allant même à les distinguer des adultes. Découlant de cela, certains auteurs se sont intéressés à ce qu’ils ont eux-mêmes choisi d’appeler la crise du quart de vie. Depuis, de nombreux chercheurs se sont aussi penchés sur la question.
Déjà à la période de l’adolescence, les choix sont importants. On pense au choix de mathématiques au secondaire qui auront une influence sur les futurs choix scolaires. Par contre à l’arrivée de la majorité et de la vingtaine, les prises de décisions sont plus importantes, ont un plus grand impact et les responsabilités sont plus grandes. Pourtant, tous les adultes dans la vingtaine ne vivent pas cette soudaine prise de responsabilité de la même façon. Vous est-il déjà arrivé dans la vingtaine de vous demander si les choix que vous avez faits sont les bons? De vous questionner à savoir si vous vous sentiez vraiment prêt à prendre de grande décision pour votre futur? Ou encore de vivre de la frustration parce que vous n’aviez toujours pas trouvé ce dans quoi vous voudriez étudier ou travailler? Peut-être vous est-il même déjà arrivé de vous promener sur les réseaux sociaux et de voir une personne que vous n’aviez pas vue depuis longtemps et qui est désormais établie avec son emploi, en relation de couple et une maison et de vous questionnez à savoir pourquoi vous n’aviez toujours pas franchi certaines de ses étapes. Ce faisant, vous remettiez en doute vos propres choix de vie?
La bonne nouvelle est que vous n’êtes pas seul. Bien que la crise du quart de vie ne soit pas généralisable chez tous les jeunes dans la vingtaine, plusieurs d’entre eux composent avec celle-ci d’une manière ou d’une autre. Robbins et Wilner (2000) ont toutefois remarqué que nombreux sont les jeunes adultes à vivre cette période de leur vie en silence, afin d’éviter le jugement des autres. Partant de ce constat, il serait bien de laisser tomber les tabous de cette crise afin d’aider ceux en souffrance.
Certains la vivent parce qu’ils n’ont pas trouvé de sens à leur vie et leur identité, à leur choix d’études ou d’emploi par exemple. D’autres vivent les doutes suite à la fin de leurs études alors qu’ils réalisent qu’ils n’ont pas nécessairement fait le bon choix de programme ou que le marché du travail ne correspond pas à ce qu’ils croyaient durant leur cheminement scolaire. Cette crise peut être vécue de façon très stressante et très anxiogène pour certains jeunes adultes. Certains doivent également faire le deuil de l’adolescence et de la liberté que celle-ci offre au profit d’un mode de vie très différent.
Jeffrey Arnett (2000) croyait que les jeunes adultes vivaient une période de leur vie bien particulière. En effet, les temps ayant bien changé, les marqueurs traditionnels d’entrée à l’âge adulte des générations précédentes (scolarisation, travail, mariage, etc.) ont été repoussés beaucoup plus tard, soit dans la trentaine. Ainsi, les jeunes d’aujourd’hui utilisent leur vingtaine afin d’explorer leur identité, que ce soit au niveau scolaire, du travail ou encore des relations amoureuses. Ils sont beaucoup plus instables, c’est-à-dire qu’ils n’ont plus un parcours où tout est déjà tracé d’avance. Ils peuvent faire des retours aux études ou changer d’emploi à de nombreuses reprises par exemple. Plusieurs jeunes dans la vingtaine ne se considèrent plus comme des adolescents, mais ne se disent pas totalement adultes puisqu’ils ne croient pas avoir atteint les « standards » requis. Finalement, les jeunes adultes vivent à un âge de possibilités. Alors que les générations précédentes étaient plus limitées dans leur choix, la génération actuelle bénéficie d’une société où tout est possible (Arnett, 2000).
Devant autant de choix et d’avenues possibles, il est donc permis de se demander s’il est normal de se questionner et de douter. La réponse, bien que pouvant être complexe, est que douter n’est pas une mauvaise chose. Bien que la majorité soit atteinte à 18 ans, il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une époque où l’adulte est encore très jeune ! Certes, il peut être difficile d’accepter que nous ne soyons pas rendus là où nous souhaitions l’être, mais ça ne veut pas dire qu’il est impossible de répondre à ses questions. L’adage dit que tous les chemins mènent à Rome, donc, le chemin n’est pas nécessairement le même pour tous et peut nous amener à de nombreuses avenues et expériences différentes. Accepter le doute, bien que chose difficile à faire, est un premier pas vers la résolution de cette crise ainsi que de trouver réponse à ses nombreuses questions.
Si tu te sens dans cette situation, que cela t’affecte grandement et que de nombreuses questions personnelles, scolaires et professionnels restent en suspend, il est possible de trouver l’aide à tes besoins. Chercher de l’aide peut être bénéfique afin d’éviter de vivre une période de remise en question, d’isolement et de dépression. Les intervenants du Carrefour jeunesse-emploi Beauce-Nord peuvent t’accompagner dans ton cheminement si tu en sens le besoin. N’hésite pas à prendre rendez-vous avec eux en appelant au 418-386-2532 ou 418-397-8045 !
CAPSULE
Je vous invite à écouter l’extrait radio « la crise du quart de vie : table ronde » qui est une discussion sur cette crise et différentes expériences de vie et différents points de vue forts intéressants sur la question.
LIVRE
Alexandra Robbins et Abby Wilner sont les auteures du livre Quarterlife Crisis: The Unique Challenges of Life in Your Twenties. C’est ce livre qui a d’abord introduit le concept de la crise de quart de vie. Ayant d’abord fait de nombreuses recherches afin de documenter leur ouvrage puis ayant fait le récit de vraies personnes ayant vécu cette crise. Un ouvrage recommandé pour en savoir plus sur le sujet!
RÉFÉRENCE
Arnett. J. (2000), Emerging Adulthood, : A theory of development from late teens through twenties. American Psychologist. 55(5), 469-480. Consulté le 29 mars 2017
Masbourin. P. (2017, 18 mars). La crise du quart de siècle : Table ronde [Extrait radio] Repéré à : http://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/la-route-des-20/episodes/377099/gagnante-concours-crise-quart-de-vie-ruralite-hauris-lalancette-coco-belliveau-francophonie
Consulté le : 29 mars 2017
Robbins. A. et Wilner. A. (2001). Quarterlife Crisis: The Unique Challenges of Life in Your Twenties. New York : J.P. Tarcher/Putnam.